Présentation

« Harpicide at midnight. La danse commence, le rythme devient de plus en plus insistant.

La mélodie se perd, et finalement il n’y a plus que la pulsation des pieds qui dansent. »

(traduit de l’anglais)

Ce sont les mots écrits par Pearl Chertok, en préambule du 3^e mouvement de sa suite pour harpe Around the Clock. Cette pièce se démarque par l’histoire qu’elle raconte, dont chaque mouvement est un nouveau chapitre. L’auditeur débute dans les avenues new-yorkaises bordées de vitrines luxueuses. Dans le deuxième mouvement, une jeune femme se parfume et se pomponne pour sortir. La citation ci-dessus décrit ensuite une piste de danse endiablée, et la musique est lancée dans un rythme effréné. La suite se clôture sur le mouvement « The morning after » (« Le matin d’après »), qui décrit un réveil difficile, mais ensoleillé, avec des bribes de quelques musiques entêtantes de la veille.

Harpiste américaine, Pearl Chertok imprègne toutes ses compositions de sa pratique du jazz. Harmonies, rythmes et péripéties nous conduisent de l’autre côté de l’Atlantique, dans les années d’après-guerre.

Ce récital explore la harpe comme prétexte pour raconter des histoires, telles que celle d’Eugène Onéguine dans la Fantaisie sur un thème d’Eugène Onéguine d’Ekaterina Walter-Kühne. Cette dernière a repris des mélodies composées par Tchaïkovski dans son opéra Eugène Onéguine, mélodrame au comble du romantisme, pour écrire une fantaisie pour harpe. Cette pièce, d’une grande virtuosité, exprime avant tout les destins funestes des quatre personnages principaux Tatiana, Olga, Lensky, et Eugène Onéguine. Ekaterina Walter-Kühne reprend la mélodie d’une valse dans l’acte I de l’opéra, un air de l’acte II où Lensky déclare son amour désespéré à Olga, et surtout le thème dit « du destin », qui rappelle l’avenir douloureux de chacun des personnages.

Marcel Tournier, quant à lui, choisit de composer sur des thèmes aux évocations aussi bien musicales que picturales. Cloches sous la neige, par exemple, reflète la résonance assourdie de cloches lointaines, mais aussi un paysage hivernal, immobile, et bordé d’arbres enneigés. Le titre qui regroupe ces pièces, 4^e suite d’Images, prend alors tout son sens. Par le biais de son œuvre, Tournier dépeint lui aussi des événements, mais il laisse l’auditeur en imaginer lui-même les rebondissements et le dénouement.

De l’opéra au jazz, en passant par les trilles de Rameau et les arabesques de Tournier, harmonies new-yorkaises et européennes s’entremêlent en une fresque musicale chatoyante aux multiples décors.