Présentation

L’idée du « cercle magique », comme il le dit, hante Schumann depuis sa première rencontre avec Clara Wieck. Ce cercle serait le domaine dans lequel l’esprit entre lors de l’écoute, ou au moment de jouer une pièce, et correspondrait à une élévation progressive hors de la sensibilité naturelle et quotidienne, vers une nouvelle perception du temps, de la vie, et du son.

Ce concept étrange évoque chez le lecteur moderne une certaine idée du pouvoir rituel, occulte de la musique : enchantement bien réel que Schumann, pourtant attaché à une dimension biographique dans son œuvre, souhaite plus que tout.

Dans ses quatuors à cordes, conçus de manière cyclique en 1841, et particulièrement dans le 3^e, cet enchantement est provoqué par une science musicale issue à la fois de l’école baroque dans ses ornements et sa trame harmonique, du classicisme pour la perfection formelle, et du romantisme pour son approche de cette part divine de la musique ; si ces trois domaines sont ici présents, c’est qu’ils provoquaient en Schumann cette exaltation, ces idées à la logique humaine et libre.

Une pareille fusion des approches constitue la quête d’Anton Webern dans son quatuor de jeunesse 1905, où la lente progression des harmonies fait se refléter le monde intérieur adolescent et spirituel du jeune homme. Plus tard, dans les Bagatelles, cette capacité d’écoute et de contemplation est poussée à son extrême, à travers six éclairs aussi aveuglants que mystérieux.